« Quand on est suffisamment entendu, on peut redevenir inventeur de soi-même. » Nicolas Frize
Parlez-moi de vous est un dispositif graphique, sonore et interactif proposé par Myriam Drosne et Marc Daniau. Le but est de créer les conditions favorables à la rencontre, prioriser l’altérité et questionner l’habitant.e dans son rapport à son environnement. Prendre le pouls de la ville par l’écoute de ses habitants. Parce que parler et surtout être écouté devient de plus plus crucial : quand les temps sont durs, l’écoute attentive est un cadeau, peu cher et très signifiant. La crise sanitaire que nous traversons nous rappelle l’importance du lien social, générateur d’humanité. S’écouter en est l’instigateur, l’acte par lequel je reconnais la présence de l’autre. Le psychiatre Serge Tisseron rappelle que « Rien ne mobilise autant l’être humain que de pouvoir parler de lui et d’être écouté. »
Myriam Drosne converse, Marc Daniau portraiture.
Converser vient du latin conversari qui veut dire fréquenter, s’associer, vivre avec, seule signification jusqu’au 16è siècle. C’est à partir du 17ème siècle que conversation exprime un échange de propos.
Plusieurs scénarios de RESTITUTION sont possibles : – Exposition graphique et sonore sous la forme d’un parcours à voir et à écouter : sous la forme d’un journal de bord, exposition des dessins originaux accompagnée d’un montage sonore. – Ecoute immersive des conversations dans des assises à l’aide de casques, accompagnée des originaux à parcourir. – Montage vidéo intégrant les dessins et le son, de manière à constituer un film plus ou moins long. – Diffusion dans la presse, parution papier des dessins et des mots/phrases recueillis …
Parlez-moi de vous à Martigues (13) en juillet et novembre 2021, dans le cadre d’une résidence d’auteur initié par l’association Grains de Lire (84), en partenariat avec la médiathèque Louis Aragon et le foyer ADOMA.
Exposition en avril 2022 : diffusion vidéo et sonore, exposition des dessins originaux et atelier fresque participatif sur le thème : « c’est quoi pour vous accueillir ? »
EXTRAIT de conversations avec des Martégales et Martégaux. Christian et sa fille Geneviève, rencontrés dans l’exposition HOT de la médiathèque Louis Aragon nous racontent :
« Le 31 décembre à minuit, tous les pétroliers à quai ou dans la rade se mettaient à corner pendant quelques minutes. C’était impressionnant, il y a quelque chose d’inracontable, l’effet que ça faisait n’est pas descriptible… On habitait la maison la plus à l’ouest de Martigues. Dans ces petites villas, tous les enfants avaient 4, 5 ans d’écart. On allait jouer tous ensemble et très souvent au « foyer », c’était l’hôtel resto de cette exposition. Il était déjà désaffecté et on faisait tout autour au patins à roulettes, on jouait à se marier, on rentrait parfois à l’intérieur… Le film Shining que j’ai vu plus tard m’a immédiatement fait penser à l’intérieur de cet hôtel. Ensuite il a réouvert et puis a refermé. Pour moi, j’ai eu une enfance de rêve. Les gens nous disaient : mais vous vivez au milieu des usines, des fumées de pétrole… ! Autour, il n’y avait que de la pétrochimie. Aujourd’hui, ces odeurs me rappellent de bons souvenirs ! On avait une telle liberté, de tels espaces de jeu, la côte à côté … Je n’ai que des bons souvenirs. Ma famille a été logée là car mon père est venu y travailler, c’étaient des logements de fonction pour les employés de l’usine BP qui dataient de 1956. De ma chambre, je voyais les torchères de la raffinerie flamber ! Dans la nuit c’était très impressionnant! Parfois il y avait des coups de béliers, des détonations produites par des bulles d’air dans les tuyaux. A l’époque dans le coin, il y avait 11 ou 12 raffineries. Derrière nos villas, il y avait les gros pipelines, on montait dessus pour chevaucher des montures imaginaires. On avait intégré ces équipements-là à notre quotidien d’enfants. Tout était encore totalement accessible, il y avait zéro sécurité. Par la suite, toute la zone a été classée SEVESO et tout a été rasé. »
Avec le foyer ADOMA de Martigues, nous formons et passons le bâton de parole et les crayons aux participant.e.s. Ce sont une vingtaine de personnes qui pendant une semaine vont s’initier à la prise de parole et au croquis sur le vif auprès d’habitant.e.s de Martigues afin de prendre le pouls de la ville. Dans la médiathèque Louis Aragon, au foyer ADOMA, en balade urbaine et à la plage.
Extrait : » Je m’appelle Ibrahima et j’aimerais savoir comment vous vous sentez ici, à la plage ? » « Moi, c’est Christian. Tant qu’il y a le soleil, je suis bien, moi ! Eh oui, c’est ma vie le soleil ! A part ça, ça va toi ? « »Ca va, oui. Et la nature, aujourd’hui, comment ça va ? Pas trop chaud ? » »Ca va, on est au mois de novembre et on peut se baigner encore ! »
Extrait : »Martigues est constitué de trois quartiers. Il y a très longtemps, c’étaient trois villes différentes qui ont été réunifiées au 16ème siècle. Ici nous sommes sur l’île qui est centrale, au quai des anglais. En face il y a Jonquière et de l’autre côté Ferrière. Notre médiathèque a été ouverte en 1981, elle va avoir 40 ans. On nous appelle la Venise provençale parce qu’on est sur des canaux. »